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Exécution abusive du bail commercial : résolution aux torts du locataire

Affaires - Commercial
Civil - Immobilier
13/03/2021
Une cour d’appel, ayant constaté la mise à disposition à titre onéreux de locaux pour l’activité du preneur, a pu établir l’existence d’un bail commercial – verbal – entre les parties. Dès lors que l’occupation des bâtiments par le locataire excédait l’assiette du bail et relevait d’une exécution abusive de celui-ci, est justifiée la résolution dudit bail aux torts du locataire, débiteur d’un arriéré de loyers.
Un bail commercial peut être conclu verbalement et l’application du statut des baux commerciaux n’est pas remise en cause dès lors que la formation du contrat est établie. Le locataire doit respecter ses obligations selon ce qui a été convenu avec le propriétaire des locaux occupés.
 
Selon les faits de l’espèce, à compter du 14 mars 2001, date de sa création, une SARL X… avait exercé son activité commerciale (consistant, notamment, en la location de véhicules industriels et en la réalisation de travaux agricoles) dans un corps de ferme appartenant à la société d’exploitation agricole Y… et ce, sans contrat écrit. Reprochant à la société X… d’occuper les lieux sans droit ni titre, l’EARL Y… l’avait assignée, le 24 novembre 2016, en expulsion et paiement d’une indemnité d’occupation ; la société X… avait reconventionnellement soutenu être titulaire d’un bail commercial sur l’ensemble des bâtiments composant le corps de ferme.
 
Par jugement du 21 septembre 2018, la demande reconventionnelle de la société X… tendant à voir reconnaître l'existence d'un bail commercial avait été déclarée irrecevable comme prescrite et cette société avait été reconnue occupante sans droit ni titre du corps de ferme appartenant à l’EARL : l’expulsion de la société X… avait été ordonnée ainsi que sa condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation.

La société X… avait relevé appel de ce jugement, tandis que l’EARL Y… reprochait à l’occupante de s’être indûment accaparée divers bâtiments du corps de ferme.
 
Existence d’un bail commercial
 
Considérant que la demande de la société X… en reconnaissance de l'existence d'un bail commercial n'était pas prescrite, la cour d’appel a estimé que cette dernière était titulaire d'un bail commercial portant seulement sur un hangar à usage d'atelier et son extension aux locaux à usage de bureau et sanitaires qui dépendaient du corps de ferme (deux factures montraient le caractère onéreux de leur mise à disposition par l’EARL Y…). Ayant prononcé la résiliation de ce bail commercial aux torts de la locataire, les juges du fond l’ont condamnée à payer à l’EARL la somme de 39 423,62 euros au titre des loyers impayés et une indemnité d'occupation fixée à la somme annuelle de 15 543,11 euros jusqu'à sa libération définitive et totale des lieux (CA Amiens, ch. éco., 14 nov. 2019, n° 18/04026, Lamyline).

Faisant grief à l’arrêt d’appel de prononcer la résiliation du bail à ses torts, la société X… a porté le litige devant la Cour de cassation.
 
Assiette du bail commercial
 
Le corps de ferme étant divisible, la cour d’appel a recherché quels étaient les biens loués, autrement dit quelle était l'assiette du bail.
 
En retenant que l’occupation par la société X… de l’intégralité du corps de ferme et des terrains attenants excédait l’assiette du bail et relevait d’une exécution abusive de celui-ci, elle a souverainement déduit, de ce seul motif, que ce manquement justifiait la résolution du bail aux torts de la locataire. D’où rejet du pourvoi.
 
Pour aller plus loin 
Pour des compléments sur l’objet du contrat de bail et, notamment, les locaux commerciaux loués, se reporter aux nos 969 et s. de l’édition 2020 du Lamy droit commercial.
Source : Actualités du droit